ALLOCUTION DE SON EXCELLENCE PR. FAUSTIN ARCHANGE TOUADERA, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, CHEF DE L’ETAT A L’OCCASION DE LA JOURNEE MONDIALE DE LA LUTTE CONTRE LA TRAITE DES PERSONNES

2 Août 2020

BANGUI, 30 JUILLET 2020

– Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale ;

– Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement ;

– Mesdames et Messieurs les Membres du Gouvernement ;

– Madame l’Ambassadeur, Haut Représentant des Etats Unis d’Amérique auprès de la République Centrafricaine ;

– Monsieur le Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales ;

– Mesdames et Messieurs les Responsables des Organismes internationaux intervenant dans le domaine de la Protection de l’Enfant ;
– Mesdames et Messieurs ;

Le 30 juillet de chaque année, le monde entier commémore la Journée Mondiale de la lutte contre la Traite des Personnes.
La République Centrafricaine, à l’instar des autres pays du monde, a ratifié le Protocole de l’Organisation des Nations Unies visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes en 2006, puis a révisé le Code pénal en 2010 pour y inclure une section sur la traite des personnes.
Le Protocole additionnel de la Convention des Nations Unies contre la criminalité Transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, définit la Traite des Humains comme: « le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie ou abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation.

L’exploitation comprend, au minimum, l’exploitation de la prostitution d’autrui ou d’autres formes d’exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage, la servitude ou le prélèvement d’organes. »
Le recrutement forcé par les groupes armés est la forme la plus répandue de traite des personnes en République Centrafricaine.
Le recrutement peut avoir lieu par enlèvement ou menace de violence. Dans les groupes armés, les femmes et les filles sont violées et exploitées sexuellement. Les enfants sont utilisés comme porteurs ou combattants. Les jeunes sont particulièrement vulnérables au recrutement.
En ce qui concerne le mariage forcé ou précoce, plus de 68% des filles sont mariées avant l’âge de 18 ans en République Centrafricaine et un nombre inconnu de femmes se marient contre leur volonté.
Mesdames et Messieurs ;
Comme je viens de le rappeler, la traite des êtres humains est une forme moderne d’esclavage qui viole la dignité humaine. Elle nait et se nourrit des inégalités sociales, des conflits internes ou internationaux et de l’instabilité socio-politique.
En organisant cette Journée, l’ONU nous invite à nous interroger sur la question de l’esclavage moderne, ce crime odieux qui affecte tous les Etats de la planète, que ce soit en tant que pays d’origine, de transit ou de destination des victimes.
En République Centrafricaine, les crises politico-militaires de ces dernières décennies, outre qu’elles ont anéanti les services étatiques, accentué la paupérisation des populations vulnérables, détruit les bases de notre société, ont créé un autre comportement rétrograde qui est celui de ceux qui font le commerce et exploitent des êtres humains ou recrutent des enfants soldats.
Notre pays a consenti des efforts importants pour contrecarrer ce phénomène.
En effet, pour protéger la dignité humaine, notre législation, notamment le Code pénal, en son article 151, punit d’une peine plus sévère, à savoir la perpétuité, ces actes que la morale réprouve.
Dans le cadre de cette lutte, nous avons rendu opérationnelle l’Unité Mixte d’Intervention Rapide et de Répression des Violences Sexuelles faites aux Femmes et aux Enfants (UMIRR) ; procédé au lancement de la campagne de lutte contre l’enrôlement des enfants dans les forces et groupes armés et à la libération de plus de 14.367 enfants soldats dont 3.892 filles et 10.075 garçons.
Aussi, devant la gravité de la situation, j’ai nommé un Point focal de la Coordination nationale de lutte contre la traite des personnes et validé le 12 mars 2020, la vision stratégique et le Plan d’Action National 2020, de lutte contre la Traite des Personnes en République Centrafricaine.
Je viens de promulguer le nouveau Code de Protection de l’Enfant dont certaines dispositions répriment la traite des êtres humains.
Malheureusement, et comme j’ai eu à le souligner en certaines circonstances, en dépit des sanctions prévues par la loi et des mesures prises pour endiguer le mal, des réseaux criminels qui écument notre pays à la faveur de la crise, continuent de pratiquer impunément la traite des êtres humains.
Dès lors, j’instruis les Ministres de la Justice, de la Promotion de la Famille et de la Protection de l’Enfant et l’UMIRR à redoubler d’effort pour identifier les comportements, les attitudes et pratiques en matière de traite des êtres humains ainsi que les coupables aux fins d’une sanction pénale.
Les restrictions imposées par le Gouvernement pour contrer le Coronavirus ne doivent pas anéantir notre ferme volonté de lutter contre ce fléau d’un autre siècle.
Mesdames et Messieurs ;
Il est généralement reconnu que la traite des êtres humains est un phénomène de portée nationale et mondiale contre lequel les mesures nationales sont parfois insuffisantes.
Lorsqu’elle est réprimée plus vigoureusement dans un pays, elle reparaît le plus souvent dans un autre pays. Vous aurez compris, le défi est énorme, mais il n’est pas insurmontable.
C’est pourquoi, j’invite solennellement les Etats Unis d’Amérique, l’Union Européenne, l’Union Africaine ainsi que les Organisations Internationales voire Nationales, à continuer à soutenir notre pays dans cette lutte sans merci qu’il a engagée contre ce crime odieux.
En terminant mon propos, je voudrais donc saluer les efforts des Etats Unis d’ Amérique, de l’UNICEF, du PNUD, du Barreau Américain, de l’OIM, des Organisations Internationales et Nationales en faveur de République Centrafricaine pour éradiquer ce phénomène.
En vue de la consolidation des acquis, de la prévention et la prise en charge holistique des enfants, je lance à nouveau un vibrant appel à la communauté internationale, aux partenaires techniques et financiers et aux bailleurs de fonds, de soutenir les efforts du Gouvernement pour la protection des droits des enfants, la réinsertion sociale et la réintégration socio-économique des enfants enrôlés dans les groupes armés.
Ensemble, disons « Stop à l’exploitation des êtres humains ».

Je vous remercie.